Retour à la poussière

2016-2024

Exposition personnelle au Musée départemental Arles antique — Festival International des Rencontres d’Arles 2024

Qu’est-ce qui traverse les âges, qu’est-ce qui retourne à la poussière ? C’est cette question universelle et vertigineuse que Marguerite Bornhauser a placée au cœur de Retour à la poussière.

La série prend forme lors d'une résidence artistique menée sur le chantier archéologique de la Verrerie, à Arles, en 2016. Ce site chargé d'Histoire, où se superposent les vestiges de deux maisons romaines de deux époques différentes, décorées de fresques exceptionnelles, et les traces plus récentes d'une verrerie datant de la Révolution française. Au cœur de ce dédale de couches archéologiques, ce sont les méthodes de travail des archéologues elles-mêmes qui vont inspirer l’artiste. Lors de ses déambulations, elle observe les caisses utilisées par les équipes de fouille afin de préserver les fragments mis au jour. Ces caisses sont remplies de sable noir, formant des écrins sombres, étoilés, dans lesquels les morceaux de fresque, de céramique ou d'enduits peints sont délicatement posés. Cette image de débris suspendus dans le noir, comme des étoiles dans le cosmos, lui apparaît aussitôt comme la métaphore parfaite de son propre ressenti face au chantier. C’est le lien entre la représentation de l'immensité du temps face au minuscule des vestiges et des poussières.

Marguerite Bornhauser joue avec les échelles, projetant le fragment de quelques centimètres sur des fonds tantôt pris au microscope, tantôt photographiés au télescope. Cette démesure souligne l’immensité, l’infini d’une nuée de constellations. L’objet archéologique apparaît dès lors suspendu, en apesanteur, à l’égal du temps dont il est le témoin. À travers des photographies, des montages, des installations de fragments, Marguerite Bornhauser nous plonge dans la couleur, la matière, le détail. Les débris deviennent des entités vivantes, des étoiles en décomposition, des constellations en formation, nimbées d’une pluie de poussière, un retour à l’infini, à la poussière.

Son exposition personnelle, présentée lors des Rencontres de la Photographie d'Arles en 2024, est une expérience sensorielle. Conçue avec Big Time Studio, la scénographie souligne ce jeu d’échelle et de temporalité. Une salle plongée dans le noir, des images suspendues sur des supports transparents, un sol de sable noir. L'exposition est pensée comme une expérience cosmique, à contempler ce que le chantier de la Verrerie garde en mémoire : des histoires passées, des vestiges de civilisations, des traces de notre propre humanité.

Face à l’immensité du temps, face à la fragilité de notre propre existence, ce travail souligne l’urgence de prendre soin de la terre, afin que ce que nous laisserons derrière nous soit porteur de mémoire, de conscience, et d’espoir — la promesse que le futur saura s’enrichir de ce que le passé lui a transmis.